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Ligue1. Six ans après avoir failli disparaître, le RC Strasbourg fait son grand retour

Ligue1. Six ans après avoir failli disparaître, le RC Strasbourg fait son grand retour

3 290 jours après son dernier match en Ligue 1, voilà le Racing Club de Strasbourg qui retrouve officiellement sa place dans l’élite du football français, grâce à sa victoire hier face à Bourg-en-Bresse (Ligue 2). Une performance, pour un club plus que centenaire qui a connu le dépôt de bilan il y a six ans, couplé à une descente en CFA2. Du purgatoire amateur au paradis de la première division, retour sur ce remarquable come-back.

On avait laissé le Racing Club de Strasbourg en Ligue 1 en 2008. Trois ans auparavant, le RCS affrontait l’AS Roma. Trois ans après, il déposait le bilan, descendait en CFA2 et les noms de ses adversaires se révélaient moins clinquants : Forbach, Vesoul, Schiltigheim… À cette époque, ce sont les supporteurs alsaciens qui doivent, pendant l’été, se charger de nettoyer les sièges du stade de la Meinau, l’antre du Racing, faute de budget. La première journée du RCS doit même être reportée, faute de joueurs.

La conséquence d’une gestion calamiteuse du club depuis des années. En coulisse, le Racing Club de Strasbourg justifie pleinement sa réputation de « Marseille de l’Est », quitte à en faire trop. « Avant, ceux qui étaient à l’extérieur du club voulaient faire chuter ceux qui étaient à l’intérieur », et inversement, explique Alain Fontanel, premier adjoint au maire de Strasbourg.

Roi Ubu et liquidation judiciaire

Une période ponctuée par le mandat de Jafar Hilali – un président « un peu fou », dit Fontanel – comparé au roi Ubu, qui va jusqu’à participer, sous pseudonyme, au principal forum de supporteurs du club, ou encore à proposer officiellement une « prime de victoire » aux joueurs de…. Rouen, qui affrontaient alors Guingamp, concurrent pour la montée en Ligue 2. En août 2011, la liquidation judiciaire est finalement prononcée, le club descend en CFA2. Triste descente pour un club fondé en 1906, rare écurie à avoir dépassé les 2 000 matches en première division française.

Il faut alors tout reconstruire. Certains joueurs de National restent, comme David Ledy : « Tout le monde avait dû consentir de gros efforts pour permettre au Racing de continuer à vivre. Aujourd’hui, c’est une grande fierté de voir que tout cela n’a pas été fait pour rien ». Surtout, les supporteurs répondent toujours présent.

Records d’affluence en série

Pour le premier match de la saison, à Forbach, ils sont une centaine à faire le déplacement en Lorraine. « Et là, c’est devenu limpide, souffle « Chonchon », capo des Ultras Boys 90, principale association de supporteurs. On a eu peur de voir le Racing disparaître, mais là, on avait toujours onze joueurs sur le terrain, on s’est dit que c’était toujours notre équipe, notre club ». Pour le premier match à domicile de la saison, ils sont près de 10 000 spectateurs à la Meinau pour assister à la victoire du RCS face à Illzach-Modenheim.Le début d’un engouement populaire. Dans le sillage du RCS – qui devient RCSA pour « Alsace » – tous les records d’affluence tombent : près de 11 000 spectateurs en CFA 2, 20 000 en CFA et 27 820, enfin, en National. « Ce sont les supporteurs qui ont permis de sauver le club, estime Alain Fontanel. Ils ont attiré la lumière sur le club, ce qui lui a permis de retrouver des partenaires. ». Au contraire de certains grands noms du foot français qui ont connu la même dégringolade (Le Mans, Cannes, Grenoble), le RCS, porté par ce soutien, n’a ainsi « pas eu le temps de végéter », poursuit l’élu. « Strasbourg, et toute sa région, c’est vraiment un club incroyable. Si on en est là aujourd’hui, c’est aussi grâce à eux. Ils font tellement de bruit à la Meinau qu’on est obligés de se survolter », soulignait à France Bleu Alsace le milieu de terrain Dimitri Liénard.

Seul couac : une descente sportive à l’issue de la première saison en National. Le club est finalement repêché grâce à l’affaire Luzenac. Depuis, les Alsaciens ont retrouvé le professionnalisme, à l’été dernier, un statut qu’ils avaient abandonné après le dépôt de bilan. Thierry Laurey a succédé au Malouin Jacky Duguépéroux, a gardé le noyau dur d’un groupe de National, renforcé par de nombreux joueurs expérimentés (Boutaïb, Goncalvès, Mangane) et le club, promu, a fait preuve d’une certaine régularité pour prendre la tête de la Ligue 2 au meilleur des moments, dans une Meinau flamboyante.

 On a soldé un passif et un passé »

« Le Racing est une institution du nord au sud de l’Alsace. Il n’y a pas une ville, un village, une famille qui ne parle pas du Racing », insiste Léonard Specht, ancien défenseur international et éphémère président du club, pour expliquer cet engouement. Et c’est un autre ancien de la maison, Marc Keller, qui a repris les rênes du club, en 2012, avec une dizaine d’investisseurs locaux, dont le champion de rallye Sébastien Loeb. "Marc est un homme qui a Strasbourg dans le sang et le Racing dans le cœur", raconte le premier adjoint au maire de Strasbourg. L’ancrage est régional, et la reconstruction amorcée sur des bases saines. Bref, une rupture avec le début des années 2000, durant lesquelles le RCS était devenu un habitué de l’ascenseur et des querelles de clochers.

De ses années en amateur – six au total – le RCS a pris ainsi au mot l’expression « purgatoire ». « On a soldé un passif et un passé », ose l’élu. Après quatre montées en six ans, le club en ressort comme débarrassé de tout ce qui l’avait plombé ces dernières années, délivré de ses péchés. Alors qu’il était condamné aux entrailles du football français, le Racing Club de Strasbourg a gagné sa place au paradis. La preuve, s’il en fallait, que les grands clubs ne meurent jamais

Jonathan PIRIOU

mai 20th, 2017

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