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Inquiétude à Radio France après la condamnation d’un Mathieu Gallet “affaibli”

Inquiétude à Radio France après la condamnation d’un Mathieu Gallet “affaibli”

La ministre de la Culture a appelé le patron de Radio France à démissionner après sa condamnation pour favoritisme. Une position précaire qui suscite des craintes dans les rédactions, confrontées à de lours enjeux.

Un verdict inédit: lundi, le président de Radio France, Mathieu Gallet, a été condamné à un an de prison avec sursis et 20 000 euros d'amende, pour "favoritisme" lorsqu'il présidait l'INA. Il était poursuivi pour avoir commandé environ 400 000 euros de prestations à deux sociétés de conseil sans avoir respecté les règles des marchés publics. 

En filigrane, la crainte de la fusion des rédactions

Depuis plus de 24 heures, Mathieu Gallet, via son avocat, reste ferme: malgré l'appel de la ministre de la Culture à en "tirer les conséquences", il ne démissionnera pas. Et vient même de faire appel de la décision du tribunal de grande instance de Créteil. "L'appel de la ministre est surprenant, indique à L'Express l'avocat de Mathieu Gallet, maître Christophe Ingrain. Il n'est d'ailleurs pas condamné puisque l'appel suspend tous les effets du jugement. Il n'y a aucune raison pour qu'il démissionne."  

A la Maison de la Radio, K, journaliste pour France Info, ne veut pas se prononcer sur cet appel. "On peut aussi comprendre la réaction de Françoise Nyssen, il y a une demande d'exemplarité. Mais ce qui peut nous inquiéter, c'est que l'on rentre dans une période de turbulences pendant laquelle on va avoir pas mal d'enjeux. C'est dans ces moments-là que l'on doit avoir un président capable de nous défendre." 

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Les enjeux sont effectivement lourds: dans les pistes de travail qui ont fuité en novembre dernier dans Le Monde, le rapprochement de Radio France et de France Télévisions était clairement évoqué. Premier pas vers la mutualisation des effectifs? En décembre dernier, on apprenait la mise en place d'une direction de l'information internationale à Radio France, visant à remplacer les services étranger de France Inter, France Culture et France Info.  On sait bien que c'est pour préparer la fusion vers France Télévisions, assure à L'Express C. un journaliste de France Culture. Et c'est quelque chose qui nous fait très, très, très peur. Ça va profondément transformer la façon que l'on a de travailler et à laquelle on tenait, qui faisait de nous des journalistes polyvalents, qui allaient sur le terrain. Quand les services seront mutualisés, on ne sera plus que des producteurs de contenus. Avec Mathieu Gallet affaibli, il ne va plus pouvoir rien faire pour nous. Et s'il part, on va se retrouver avec une tutelle qui va nous fusionner en marche forcée." 

"Agnès Saal a démissionné pour moins que ça"

Autre son de cloche chez un journaliste de France Inter. "Mon sentiment, c'est qu'il doit démissionner, lance-t-il, toujours sous couvert d'anonymat. Mathieu Gallet ne peut pas rester en poste après une condamnation aussi importante! Agnès Saal avait démissionné pour moins que ça." Nommée présidente de l'INA en 2014, succédant à Mathieu Gallet, Saal avait été contrainte à la démission après avoir été condamnée pour "détournement de fonds public". En 10 mois, Saal avait fait dépenser à l'organisation 40 000 euros, rien que pour ses déplacements en taxi.  Contrairement à nos deux précédents interlocuteurs, le dernier n'a toutefois jamais considéré Mathieu Gallet comme un rempart protégeant les journalistes. "Il devance déjà les projets du gouvernement, à mon sens. Avec cette condamnation, il pourra d'autant moins s'ériger contre la volonté du gouvernement. Il est dans une position intenable." 

Que Mathieu Gallet décide de rester en poste malgré sa condamnation et la pression du gouvernement ou qu'il parte, la pilule est dure à avaler pour les journalistes de Radio France. "En fait, on est bien embêté, résume K. Tout ça n'arrive clairement pas au bon moment, alors qu'on veut nous marier avec France Télévisions sans savoir comment. On n'a aucune alternative." Mathieu Gallet doit recevoir rencontrer les syndicats de la Maison Ronde en fin de journée. Il n'est pas sûr qu'il réussisse à les rassurer. 

Jonathan PIRIOU

janvier 17th, 2018

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